En parcourant l'histoire de l'Afrique du Nord depuis la conquête de l'Egypte par Sheshonq Ier Hedjkhepera Setepenra, descendant d'une famille de grands chefs libyens des Meshwesh qui a donné cinq pharaons aux XXIIe et XIIIe dynastie, jusqu'à aujourd'hui avec l'Egyptien Hosni Moubarak , le Libyen Khaddafi, le Tunisien Ben Ali , l'Algérien Bouteflika, le Marocain Mohammed VI et le Mauritanien Sidi Mohammed ould Cheikh Abdallah, nous éprouvons cette surprenante sensation de retrouver les mêmes faits historiques qui se répètent indéfiniment .
L'histoire de l'Afrique du Nord sur trois millénaires apparaît comme une succession de catastrophes donnant l'idée d'une vaste contrée instable dont la condition majeure de son existence est l'instabilité des Amazighs.

L'historiographie et l'histoire, depuis la haute antiquité, accordant aux mythes, aux hauts faits d'armes et aux guerres le privilège de marquer les changements des cours des évènements des peuples. Ils signalaient et associaient les Ancêtres des Amazighs aux différentes mythologies, mythes , conquêtes et colonisations phéniciennes, grecques ou romaines . Pomponius Mela nous rapporte dans sa Chorographie le combat que livra le géant Antée, fondateur mythique de Tanger, à Hercule.

Hercule étouffant Antée
La mythologie veut que le Titan Atlas soit condamné par Zeus a porter la Terre sur ses épaules et que le condamné purge sa peine en Afrique du Nord dans nos Adrar n Draren ( Chaîne orographique de l'Atlas) Les nymphes et le dragon veillant sur les pommes d'or du jardin des Hespérides se situait selon la tradition grecque dans l'arrière pays de Lixus. Homère, dans son Odyssée nous chante la Libye, le pays des Amazighs, où les agneaux ont des cornes dès leur naissance, ou trois fois dans l'année les brebis mettent bas : du prince au berger ,tout homme a son content de fromage, de viande et de laitage….
De cette image idyllique antique à celle d'aujourd'hui où les Amazighs doivent importer des céréales et des légumes pour vivre, il y a de quoi poser la question sur ce qui est arrivé a ce paradis homerien. Alors qu'autrefois, nous rapporte Hérodote dans son Histoire au tome IV, les Grecs imploraient les divinités, consultaient les oracles et cotisèrent pour armer des navires et recruter des marins afin de coloniser l'Afrique du Nord, aujourd'hui c'est l'inverse de ce qui se passait dans l'Antiquité: les Nord-Africains tentent de tromper la vigilance en mer et sur terre des Européens afin d'immigrer et de gagner leur vie.
La vie de la nation amazighe depuis son accès au trône des Pharaons jusqu'à aujourd'hui est une succession de réussites spectaculaires alternées de ruines et d'écroulements, renaissant de ses cendres à l'image du Phoenix. Elle subsiste, vivante, occupant ses plaines et montagnes, ses forêts et savanes, hantant ses sources et ses rivières, dominant son ciel et ses mers par sa volonté de vivre et de survivre.
L'histoire des Amazighs se trouve enrobée dans une gangue historique, produite par ceux qui avaient triomphé d'eux à une époque donnée. Cette histoire rédigée par les victorieux n'offre pas l'image réelle des évènements et faits historiques. Pour saisir la réalité historique, une toilette s'avère obligatoire pour évacuer tout ce qui a trait à la vanité et au superbe.
L'esprit de cette toilette à laquelle nous vous invitons s'appuie sur deux idées majeures :
- Que l'Amazigh puisse vivre sans détruire le passé historique.
- Que l'Amazigh, en réexaminant son histoire, puisse agir sans nuire au sein de lui-même qu'autour de lui.
La tâche sera difficile et les implications politiques chaudes et violentes a priori, en raison de la remise en cause du discours historiographique devenu par tradition sacré, consacré voir même canonisé pour certains.
Bien que ces faits soient sacrés et incontournables, il est possible a l'Amazigh d'en faire une autre lecture sans pour autant pécher dans un ethnocentrisme débridé qui serait interprété comme une réaction a l'islamocentrisme, l'arabocentrisme ou l'européocentrisme de la littérature disponible.
La tâche consistera à s'appuyer sur la littérature à caractère historique des vainqueurs pour écrire l'histoire des Amazighs. (Voir texte :Introduction à la lecture de l'histoire des Amazighs depuis l'avènement de l'Islam en Afrique du Nord
Il y a de quoi rire quand on lit l’une des premières leçons d’histoire officielle dispensée aux écoles publiques du Maroc, que les Amazighs sont les premiers habitants d’Afrique du nord, venus d’Arabie, via l’Abyssinie et adoraient les ovins et la volaille. Pour un enfant de 12 ans cette vérité historique est anesthésiante quand elle ne relève que de la pure réclame pour introduire les Arabes, venus également de cette même Arabie ancestrale, emboîtant le pas à nos ancêtres, apporter la vraie religion d’Allah qui au lieu de recommander l’adoration des animaux de la bergerie et de la basse cour permet leur consommation.
En une trentaine de mots cette première leçon de l’histoire officielle pour enfants fournit divers sujets de surprises allant d’une origine arabe des Berbères à la zoolâtrie.
Le premier sujet de l’origine arabe des Berbères se superpose à celui de l’origine de l’Islam, le Coran et les mythes de la Création adamique qui doit forcement rayonné à travers la Terre. En somme les Berbères ne sont autres que des Arabes qui sont venus plus tôt que les Arabes musulmans.
La fraternité adamique issue d’un mythe se heurte à la fraternité anthropologique issue de la paléontologie qui montre l’opposé de cette première leçon d’histoire officielle: à savoir que les Berbères sont sur leur continent de naissance et que les Arabes ne sont d’autres que des Berbères arabisés ayant immigré en Arabie via l’Abyssinie et le détroit de Bab Almandeb. Les rédacteurs de l’histoire officielle mise sur la dévotion des Amazighs pour ne pas remettre en cause cette annexion ethnique et ce changement du centre de rayonnement de l’espèce humaine.
Le second sujet relatif à la zoolâtrie relève beaucoup de la mythomanie des historiographes arabes dont le but est de rabaisser les cultes préislamiques des Berbères afin de justifier leur mission d’islamisation. Même Ibn Khaldoun admirateur des ruines des grandes cités préislamiques ajoute sa voie à celle de ses prédécesseurs pour faire de cette confusion des cultes non islamiques une justification à postériori de l’agression islamique contre les non musulmans aussi bien en Afrique qu’en Asie ou en Europe.
Le programme d’histoire raconte l’épopée légendaire des étriers d’Allah dont seul Oqba retient l’attention. Il aurait mis au frais les pattes de son cheval quelque part dans une plage d’Agadir ou de Safi ou d'Azilah et levant son sabre comme aurait fait un Don Quichotte en s’égosillant à l’onde océane que s’il y avait une autre contrée au-delà de cette mer il l’aurait atteinte pour prêcher l’Islam. Evidemment il avait déjà fait le plein des différents pillages et qu’il lui fallait une raison pour rebrousser chemin.
Pour d’autres Oqba n’a jamais été ni à Taroudant ni à Safi et qu’au plus il aurait été du coté de la plage de Saadia ou de Siga (situé à 4 km de l’embouchure de la Tafna, au Nord du Maroc).
Les sources arabes dont cet épisode est tiré n’offrent à Oqba que des louanges et aux Amazighs, quand ils ne sont pas odieux, ils sont traîtres, que des insultes. Même le grand Ibn Khaldoun s’évertue à signaler le chiffre numérique de leurs traîtrises face aux étriers d’Allah il en a dénombré plus d’une douzaine au cours de cette période dite de la conquête islamique.
La conquête arabe de l’Afrique du nord n’était pas une vérité précise et littérale et à chaque incursion arabe pour piller suivait un revers tragique dont l’écho retentissait à Damas et en Syrie.
Pour justifier les revers des armées arabes face à la résistance amazighe, les historiographes tardivement ont mis sur la bouche du khalife Omar Ibn Al Khattab, une prophétie sous forme d’interdiction de conquérir l’Afrique du nord en jouant sur la sémantique de son nom Ifriqya (pris pour diviser ou rompre les rangs). L’interdiction d’Omar préférant la paix à la guerre renforçait le prestige de ce grand khalife aux vues percevant un tragique avenir des étriers d’Allah notamment ceux morts avec Oqba à l’est de Biskra.

Didon (Elissa) construisant Carthage par Turner
Les Arabes installés en Syrie, en Irak et en Egypte n’avaient pas l’humeur pacifique et pacifiste et l’entreprise de la guerre sainte à leurs yeux n’était en fait qu’une forme d’enrichissement rapide par la violence, le pillage et non la propagation de l'Islam qui n’était qu’un objectif secondaire.
L’Afrique du Nord en dehors de la conquête du trône des pharaons passait le clair de son histoire dans une paix qui attire les Phéniciens, les Doriens, les Grecs, les Romains, les Vandales, les Wisigoths, les Arabes et les Européens depuis le XVe siècle.
Si la légende de la fondation de Carthage donne une idée sur la vie paisible des Amazighs (Voir l’article traitant de ce sujet:http://www.wikimazigh.com/wiki/Encyclopedie-Amazighe/Encyclo/RapportsDesAmazighsAvecLesCarthaginois) , elle nous rappelle aussi l’esprit chevaleresque de l’agellid amazigh, auquel s’était adressée Didon pour avoir la permission d’installer une colonie pour sa flottille de fuyards Tyriens, qui pour ne pas désacraliser le sacrifice exécuté pour appuyer la demande lui accorda le territoire qu’aurait contenu la peau de la victime(1).
La légende dénote aussi l’esprit ingénieux et fourbe du phénicien prêt à exploiter au maximum toutes les opportunités qui s’offrent à lui.
Cette approche pacifiste des premiers réfugiés étrangers de Tyr, historiquement connus en Afrique du nord est tout à fait à l'opposé de celle des Grecs venus à la création de la colonie de Cyrène si l'on croit Hérodote.
Bien qu’aucune trace épigraphique n’est venue confirmée le récit d’Hérodote notamment en Cyrénaïque, il demeure qu’à l’époque antique les Amazighs ont été réveillé par des flottes de colons venus du pourtour de la Méditerranée. Sans doute que l’autorité et la puissance de Carthage leur ont fait prendre conscience qu’une générosité accordée sans mesurer les conséquences futures peut causer d’affreuses conséquences. Les invasions maritimes d’Afrique du nord furent toujours repoussées par les Amazighs sauf quand ils y sont impliquées Comme dans les diverses guerres puniques et encore une autre fois leur générosité accordée à un étranger leur a valu une colonisation romaine. Chasser un colon punique avec un colon romain, revenait en fait à garder la même lame sur la gorge en changeant le manche seulement. C’est devenue une coutume spontanée, instinctive depuis les temps antiques de s’opposer à l’envahisseur et cette coutume a été toujours observée jusqu’au XXe siècle. Au cours de cette longue période les Amazighs s’étaient montrés en mesure d’infliger des défaites cuisantes aux plus grandes armées de l’époque furent elles grecques, arabes, portugaises, espagnoles ou française.
Un des objectifs de ce chapitre est de montrer que la spiritualité amazighe est restée la même depuis l’antiquité jusqu’à aujourd’hui. Tous les changements qui sont survenus étaient des changements de surface et qu’au fond l’âme amazighe est restée fidèle à elle même craignant le supranaturel qu’il soit divinité ou dieu païen ou monothéiste.
Implicitement nous allons démentir que les Amazighs n’ont jamais adoré le bélier ou la poule et qu’ils avaient bien une spiritualité de leur époque.
Une lecture de l’infrastructure maraboutique de l’Afrique du nord au XXe siècle nous permet de faire le lien avec l’infrastructure funéraire et religieuse antique révélée par l’archéologie au cours des périodes punique, néo-punique et romaine. De l’antiquité jusqu’ à aujourd’hui les générations d’Amazighs s’étaient succédées chacune passant à la suivante la mémoire collective dont elle a été l’héritière. Les lieux saints antiques ont été utilisés à différentes périodes par des saints qui peuvent être païens, chrétiens, juifs et musulmans. Le lieu saint païen est christianisé puis islamisé mais la légende qui lui est attachée tout en subissant un vernis de surface de type chrétien ou musulman n’a pas changé. La dévotion populaire amazighe en s’appuyant sur le point fixe qu’est le lieu se contente de corriger les noms et de garder le fond surtout que les anxiétés spirituelles n’ont pas changé dans leur fond mais dans leur forme.
(c)LallaYetto Kushel
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